Comments (0)
C’est un homme insignifiant, ni jeune, ni vieux, ni beau, ni ténébreux. Il porte cette coiffure de gavroche qui m’a toujours horripilée, et ne fait pas parler de lui. Pourtant, ce chanteur, découvert au hasard d’une rencontre blogueuse il y a 15 ans, m’accompagne sans le savoir. C’est le lot de tous les artistes, me direz-vous. Une fois confiée au public, leur oeuvre est « appropriée » par qui la croise et lui offre une oreille, un coeur, un corps où la laisser sonner.
Cet automne, par le plus grand des hasards, alors que je l’avais oublié, bien classé par ordre alphabétique dans une base de donnée musicale, il a refait surface. Je l’ai cherché, lui. J’ai trouvé « L’autre ». Le titre de son album dernier né.
J’ai écouté. Ecouté. Ecouté. Jusqu’à plus soif. Ecouté encore. Cette chanson dont je n’arrivais pas à cerner la « notion abstraite » qui se cachait sous Elle. Pas une femme, ç’eût été trop simpliste. Même Google n’a pas su m’aiguiller. Comment, moi, qui aide des adolescents à décrypter les auteurs français classiques, je butte sur une simple (!) chanson?
Alors, j’ai posé la question à une amie.
La vie m’a-t-elle répondu. Elle a eu la délicatesse de ne pas ajouter « mais comment as-tu pu ne pas le voir? ».
C’est de la vie dont il parle. Et avec cette justesse poignante qui ne peut laisser personne indifférent.
Et pour mieux savourer le texte:
Elle regarde le temps passer
Jusqu’aux murmures, jusqu’aux silences
Et puis se remet à chanter
Pour ce tout nouveau qui commence
Elle te prend un jour par la main
Et t’abandonne dans des tempêtеs
Te montre de mauvais chеmins
Puis cette étoile qu’elle te prête
Elle joue de chaud, elle joue de froid
Elle grimace ou elle sourit
Elle enroule autour de toi
Tantôt le jour tantôt la nuit
Elle pleure des larmes de sel
Elle pleure des larmes de pluie
Et puis explose le soleil
Et sa lumière nous envahit
Elle ne se lève jamais la même
De mauvaise humeur elle te quitte
Ou flâne doucement bohème
Près d’un feu de bois qui crépite
Elle joue parfois les héros
Parfois s’étire en fleuve tranquille
S’emballe au galop des chevaux
Ou se compte en battements de cils
Elle se déchire, elle s’embrase
Se rafraîchit de rosée
Elle s’allonge dans l’herbe rase
Ou chavire dans tous les fossés
Elle se perd dans les ruelles
Elle se retrouve dans des déserts
Les mains tendues vers le ciel
Pour embrasser cet univers
Elle s’arc-boute sous les coups
Et se redresse le bras en l’air
Elle tente le tout pour le tout
Elle ne veut pas se laisser faire
Elle est si belle quand elle joue
De sa légèreté innocente
C’est dur lorsqu’elle enfonce les clous
Dans nos espoirs de délivrance
Aux cartes noires du destin
Elle s’empoisonne, elle s’envenime
Oh, aquarelle ou fusain
C’est de l’amour qu’elle te dessine
Elle te promène à coup de trique
Lourde, à cheval sur ton dos
Elle nous avait promis l’Amérique
Pour nous ramener dans nos ghettos
Elle laisse couler le sable
Entre ses doigts de satin
Et d’une moue un peu coupable
Te fait comprendre qu’elle n’y peut rien
Je la déteste
Comme je l’aime
Je la maudis
Je la chéris
À s’écarteler de jour blême
Aux explosions de graffiti
Elle est…
Elle est…
Elle est…
LEAVE A REPLY
Your email address will not be published. Required fields are marked *
Vous devez vous connecter pour publier un commentaire.